SIC Day 1 w/ Dora García

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Programme

10:00-15:00
Masterclass Dora Garcia: Achronies, Uchronies and Fractal Narratives

15:00-17:00
Film Screening + Q&A with Dora Garcia: (Revolución, fulfil your promise) Amor Rojo

PART ONE 10:00-15:00
Masterclass: ACHRONIES, UCHRONIES AND FRACTAL NARRATIVES

En prenant comme étude de cas ses productions filmiques des dix dernières années - The Joycean Society (2013), Segunda Vez (2018) et Amor Rojo (2024) - Dora Garcia souhaite aborder trois notions qui ont été cruciales dans les longs processus de réalisation de chacun de ces films. Ces trois notions sont Uchronie, Achronie et Récit fractal.

L’Uchronie est une stratégie souvent utilisée dans la fiction spéculative et la science-fiction. Étymologiquement, elle signifie « non-temps », et dans la pratique elle désigne des lignes temporelles alternatives ou des histoires « et si ». Par exemple : Et si l’Allemagne avait gagné la Seconde Guerre mondiale ? (Philip K. Dick, The Man in The High Castle), ou Et si les États-Unis avaient eu un gouvernement fasciste en 1940 ? (Philip Roth, The Plot Against America). L’Uchronie est, au fond, un exercice d’imagination politique, et donc un modèle de réflexion sociale, historique et politique.

L’Achronie est un concept forgé par la sociologue allemande Elisabeth Lenk comme contrepoint à l’utopie (« non-lieu »). L’Achronie n’est pas une absence, mais un excès de temps - un temps condensé. L’Achronie n’est pas la simple juxtaposition d’époques, mais plutôt leur interpénétration, comme les pieds télescopiques d’un trépied, une série de structures qui se rétrécissent. Elles peuvent être déployées comme un accordéon, mais elles peuvent aussi être emboîtées les unes dans les autres comme des poupées russes, car les murs entre les époques sont extrêmement proches. Opposer l’Achronie à l’Utopie, c'est proposer un autre modèle du futur : non pas un lieu idéal situé ailleurs, mais un temps ici et maintenant, constitué d’une simultanéité de passés et de futurs différents.

Le récit fractal est un type de narration qui adopte des structures issues de la géométrie fractale. En mathématiques, un fractal est un motif sans fin, construit en répétant un élément encore et encore (itération). Les fractals sont paradoxaux car ils sont à la fois finis et infinis. Selon Benoît Mandelbrot, un fractal est une forme géométrique irrégulière ou fragmentée qui peut être divisée en parties, chacune étant (au moins approximativement) une copie réduite du tout. La géométrie fractale peut également s’appliquer à l’histoire (et, en ce sens, se relier aux théories du retour éternel ou de la boucle infinie — comme le retour récurrent du fascisme) et au langage (par exemple, certaines interprétations mystiques ou ésotériques du Coran affirment que chaque phrase du Livre possède sept sens différents, ce qui multiplie de manière exponentielle la signification de l’ensemble). Finnegans Wake de James Joyce (1939) est un exemple parfait de récit fractal, à la fois sur le plan historique et linguistique.

Dora Garcia souhaite montrer comment ces trois notions se tissent à travers ses trois films de la dernière décennie. Elle propose également aux participants plusieurs exercices. D’abord, nous reproduirons la situation de The Joycean Society en lisant ensemble et en essayant de comprendre quelques paragraphes de Finnegans Wake.

En guise d’échauffement, Finnegans Wake nous conduira à un second exercice, qui pourra commencer pendant notre rencontre et se conclure à tout moment dans le futur. Si nous pouvions revenir à un moment et un lieu précis afin de changer le cours malheureux de l’histoire, où (et quand) irions-nous ? Quels sont ces moments et lieux cruciaux ? Nous construirons collectivement une frise chronologique avec ces moments et lieux, et tenterons d’associer à chacun d’eux une image.

PART TWO 15:00-17:00
Projection + Q&A: (Revolución, fulfil your promise) Amor Rojo

Belgian Premiere Screening

Infos
Mexique, Espagne, Norvège, Belgique | 2024 | 95 min
Langues : espagnol, allemand, russe
Sous-titres : anglais, français

Synopsis
Et si l’amour était l’ingrédient manquant pour que la révolution tienne enfin sa promesse ? L’artiste Dora García explore les archives et trouve, dans les écrits percutants d’Alexandra Kollontaï — révolutionnaire du début du XXe siècle — une précieuse alliée des mouvements queer et féministes en Amérique latine et ailleurs. Un film politique et joyeusement militant.

« La solidarité ne doit pas être comprise comme la simple conscience d’une communauté d’intérêts. La solidarité, ce sont aussi les liens sentimentaux et spirituels établis entre les membres d’une même collectivité. Ces sentiments de sympathie, de douceur et de sensibilité proviennent d’une source commune : la capacité d’aimer. » – Alexandra Kollontaï

à propos Dora García

Travaillant à partir de textes, d’archives et de fichiers audio, Dora García raconte aussi bien des histoires réelles que fictives pour interroger et bousculer la société. À travers une œuvre plurielle (vidéo, écriture, performance et installation), elle remet en question la relation traditionnelle entre l’œuvre et le spectateur. Ses scénarios mêlent fiction et réalité jusqu’à la confusion, créant ainsi des situations uniques, à la fois intellectuelles et ludiques, qui sollicitent — parfois de manière obligatoire — la participation active du public à la création, à l’activation ou à la destruction de l’œuvre.
Dora García est née en 1965 à Valladolid (Espagne), elle vit et travaille à Oslo. En 2011, elle a représenté l’Espagne à la 54e Biennale de Venise.

Filmographie
(Revolución, fulfil your promise) Amor Rojo, 2024
If I Could Wish for Something, 2021
Love with Obstacles, 2020
Segunda Vez, 2018
Désordre, autour des crimes et des rêves, 2013
The Joycean Society, 2013
The Deviant Majority, 2010
Rooms, Conversations, 2006