L’« opéra-rap » du chanteur de r&b R. Kelly.
« Il regarde le placard - Je dégaine mon Beretta - Il se dirige vers le placard - Il approche du placard - Il atteint le placard - Maintenant, il ouvre le placard... » Les 22 premiers épisodes de l’« opéra-rap » du chanteur de R&B R. Kelly sont déjà cultes. Robert Sylvester Kelly (°1967) est l’une des étoiles R&B les plus adulées en même temps que controversées de sa génération. I Believe I Can Fly, If I could turn back the hands of time, Thoia Thoing : pour chaque hit, balade soul ou tube lascif R. Kelly a connu durant sa carrière l’un ou l’autre scandale (sexuel), impliquant ou non des mineurs.
En 2005 R. Kelly s’attela à Trapped In The Closet, un clip vidéo en cinq parties avec une intrigue continue, qui est devenu un opéra-rap de 12, puis de 22 chapitres. Dans son essence, Trapped in the Closet est un morceau R&B sans fin, sur un seul beat monotone de la basse, sans refrain, et avec la structure d’un feuilleton soap, avec même un cliffhanger à la fin de chaque épisode. Le titre renvoie à l’amant qui doit se cacher dans le placard au moment au le partenaire légitime de sa compagne de lit rentre inopinément. Kelly même joue le rôle du malheureux protagoniste et il présente en play-back avec les autres acteurs les paroles qu’il a d’abord enregistrées en chantant avec ses chœurs bien huilés. Le bling bling que l’on associe à son style musical résulte en une ‘intrigue’ qui s’articule autour de l’adultère, des armes et des belles nanas. La série passe bien vite à la vitesse supérieure avec des récits parallèles sur des ripoux, des voisins en rut, des gnomes, des putes, des animaux de cirque et des relations triangulaires, voire quadrangulaires qui sont tellement complexes que des arbres généalogiques sur internet doivent expliquer qui le fait avec qui.
L’univers exorbitant créé par Kelly est tellement trop que les réactions du public varient de la déférence et de la fascination hystérique, à l’égarement et l’ahurissement complets, du ‘nouveau Monteverdi ou Dostoïevski’ à ‘c’est tellement mauvais que ça en devient bien’. Le fait est que Trapped In The Closet est en même temps hilare, débile et brillant et que le “hip-hopera” - dont le compteur affiche 33 épisodes depuis 2012 et que 40 autres sont annoncés - a atteint le statut de classique du culte du mauvais bord.
R. Kelly, Victor Mignatti & Jim Swaffield, US, 2005-2007, 85 min. © Fuzzy Buzzy Films / Sony Music